Tribune
Assurance-chômage : quel carton, mes amis !

Par Jean-Claude Rennwald, conseiller national (PS/JU), vice-président de l’USS

Alors que 50'000 signatures suffisaient, l’Union syndicale suisse (USS), Unia, l’ensemble du mouvement syndical, le PS et d’autres organisations progressistes ont récemment déposé à la Chancellerie fédérale plus de 140'000 signatures à l’appui du référendum contre la révision de la loi sur l’assurance-chômage (LACI). C’est-à-dire presque trois fois plus que le minimum légal. Autant dire que jusqu’ici, la mobilisation a été forte. Mais elle doit se poursuivre de manière encore plus intense d’ici à la votation fédérale du 26 septembre.

Une révision assassine
Des dizaines de milliers de travailleurs ont perdu leur emploi ces derniers mois. Cela n’a pas empêché la majorité bourgeoise du Parlement d’adopter une révision scélérate de la LACI qui, en cas d’acceptation, se traduirait par une pénalisation massive des chômeurs les plus fragiles :

• Le nombre d’indemnités journalières passerait de 400 à 200 francs pour les moins de 25 ans sans enfants et de 400 à 260 pour les travailleurs qui ont entre 25 et 29 ans.

• Les moins de 30 ans auraient l’obligation d’accepter n’importe quel boulot.

• Les plus de 55 ans ne toucheraient plus que 400 indemnités journalières (contre 520) pour une période de cotisations de 18 à 24 mois.

• Pour tous les salariés, le gain intermédiaire ne serait plus compensé.

• Le délai d’attente pour toucher les prestations de l’assurance-chômage passerait de 5 à 10, voire à 15 ou 20 jours selon le revenu. Autrement dit, certains chômeurs n’auraient plus ni salaire, ni soutien de l’assurance-chômage pendant un mois.

Cette révision représente plus de 600 millions d’économies sur le dos des chômeurs, une baisse du pouvoir d’achat des plus faibles et une augmentation massive des chômeurs en fin de droits et du nombre de cas relevant de l’aide sociale. Soit un énorme report de charges (250 millions) sur les cantons et les communes.

Le Jura à la caisse
La majorité bourgeoise du Parlement a décidé d’abandonner la clause qui permet à certaines régions et cantons particulièrement touchés par le chômage (5 % et plus durant six mois) d’étendre la durée d’indemnisation de 400 à 520 jours, moyennant une participation de 20 % aux coûts. Ce dispositif, utilisé en ce moment par le canton du Jura, la région de Moutier, Neuchâtel, Vaud, Genève et le Tessin, est un bol d’oxygène pour les régions les plus frappées par la crise. Dans ces conditions, on ne comprend pas pourquoi le gouvernement jurassien, sollicité par le comité référendaire, n’a pas voulu prendre position contre cette révision de la LACI.

Profond malaise
Le succès du référendum exprime le profond malaise qui règne au sein de la population. En raison d’abord des bonus des managers qui ont repris l’ascenseur, des profiteurs et autres spéculateurs, qui font à nouveau tinter le tiroir caisse. Ensuite parce que les top managers versent des cotisations proportionnellement plus basses que les travailleurs qui gagnent normalement leur vie. Les prélèvements salariaux sont en effet plafonnés à 315'000 francs. Autrement dit, ceux qui ont un revenu de 5, 20 ou 50 millions ne financent l’assurance-chômage qu’à hauteur de 50'000 francs !

Les managers à la caisse
Il s’agit là d’une grave injustice, qu’il est facile de supprimer. Si les hauts revenus versaient eux aussi 2,2 % de leur salaire à l’assurance-chômage, celle-ci encaisserait 440 millions de recettes supplémentaires. Contrairement à ce qu’affirme le Conseil fédéral, il ne faudrait donc pas augmenter les cotisations pour tous les salariés.

D’ici au 26 septembre, il faudra dénoncer non seulement une révision qui se fait exclusivement sur le dos du monde du travail, mais aussi une injustice toujours plus frappante. Et ceci d’autant plus que si la gauche politique et syndicale l’emporte, cela nous placera, après le magnifique succès de mars dernier contre le vol des rentes du 2e pilier, en position de force pour affronter d’autres batailles. Les unes défensives (AVS, AI, assurance-accidents), les autres offensives (initiative sur les salaires minimaux, initiative sur la taxation des profiteurs, caisse-maladie unique, etc.).

D’ici là, les travailleurs prendront des vacances amplement méritées, mais sans oublier que c’est à partir du Front populaire, en 1936, que les congés payés se sont développés dans toute l’Europe.