Tribune
Grande victoire du PS dans le Jura, modeste sur le plan
suisse
Par Jean-Claude Rennwald, conseiller national (PS/JU),
secrétaire central Unia
Il a rarement été aussi difficile
de tirer un bilan des élections fédérales que cette année. D’abord parce
que le champ des forces politiques s’est considérablement élargi au
centre-droit. Ensuite parce que les gains ou les pertes en sièges ne
correspondent pas toujours aux avancées ou aux reculs des différents
partis en termes de suffrages. Néanmoins, quelques tendances lourdes
apparaissent.
L’échec
du parti à Blocher
L’événement le plus marquant est sans aucun doute le recul important de
l’UDC, qui a perdu 8 sièges au Conseil national, alors que ce parti
n’avait plus jamais régressé depuis 1991. Il faut en déduire qu’une
partie de l’électorat en a eu assez de ce parti populiste et xénophobe,
et que Christoph Blocher n’incarne plus celui qui sauvera le peuple
suisse de toutes ses misères. Ce recul, il est vrai, est légèrement
contrebalancé par les deux sièges glanés par deux autres forces
nationalistes, le Mouvement des citoyens genevois (MCG) et la Lega au
Tessin. Deux gains qui expriment notamment le désarroi d’une partie des
salariés face au dumping social et salarial. Mais globalement, la
pression xénophobe devrait s’atténuer.
Autre force de droite, le Parti libéral-radical (PLR) recule moins que
prévu, mais enregistre tout de même une perte de 5 sièges au Conseil
national. Parmi d’autres facteurs, le PLR paie notamment sa suffisance
et son arrogance dans plusieurs dossiers, comme ceux de Swissair ou de
l’UBS.
Vous avez
dit centre ?
Au
centre-droit, le PDC perd 3 sièges au Conseil national, alors que le
Parti bourgeois démocratique (PBD) et les Verts libéraux font des bonds
spectaculaires, avec 9 sièges supplémentaires chacun. Cet éparpillement
du centre-droit va compliquer la donne politique, d’autant plus qu’il
faudrait encore savoir de quoi l’on parle lorsque l’on utilise le mot
« centre ». Ainsi, Martin Baümle, président des Verts libéraux, s’est
déclaré disposé à coopérer avec d’autres forces du centre et de la
gauche sur les questions sociales, énergétiques et environnementales.
Mais il a ajouté que sur le thème des migrations, il collaborerait
plutôt avec l’UDC ! De là à prétendre que les immigrés représentent une
charge pour l’environnement, il n’y a qu’un pas…
Le PS
tire son épingle, mais…
A gauche, seul le Parti socialiste tire son épingle du jeu. Il va au
minimum reconduire ses 9 sièges au Conseil des Etats. Mais il gagne
surtout 3 sièges supplémentaires au Conseil national (VD : + 2 ; VS : +
1 ; FR : + 1 ; SO : + 1 ; TI : - 1 ; GL : - 1 ;). On notera au passage
qu’à l’exception de Soleure, tous les gains socialistes sont enregistrés
en Suisse romande, preuve de la justesse d’une ligne offensive sur le
plan social et proche des syndicats. Le PS recule toutefois de 0,8 % en
termes de suffrages.
Mais cela est relativement marginal par rapport au recul des Verts, qui
perdent cinq sièges au Conseil national, soit le quart de leur
députation. Si l’on combine les résultats du PS et des Verts avec la
perte du seul siège popiste, la gauche perd globalement 3 sièges à la
Chambre du peuple. Ce n’est pas un drame, mais de loin pas un triomphe
et sans doute pas un résultat susceptible de favoriser de grandes
avancées sociales.
Unia bien
présent
Le
syndicat Unia sera bien présent au Parlement fédéral et ses élus seront
à la pointe du combat pour la défense des travailleurs. On saluera en
particulier l’élection ou la réélection de Paul Rechsteiner (PS/SG), par
ailleurs président de l’USS, Corrado Pardini (PS/BE, membre du comité
directeur), Max Chopard (PS/AG), Mathias Reynard (PS/VS), Franziska
Teuscher (Verts/BE), Eric Voruz (PS/VD), Claude Hêche (PS/JU) et
probablement Géraldine Savary (PS/VD) et Jean-Christophe Schwaab (PS/VD).
Jura :
score historique pour la gauche
En
terre jurassienne, trois faits retiennent plus particulièrement
l’attention :
• Dans le canton du Jura, la gauche
a réalisé un score historique, dépassant la barre des 40 % aussi bien au
Conseil national qu’au Conseil des Etats. Dans le premier cas, le PSJ
était apparenté avec les Verts et a pu compter sur l’appui du POP et de
Combat socialiste. Preuve que le rassemblement des gauches est
susceptible de créer une dynamique positive.
• Dominique Baettig (UDC) a perdu
son fauteuil après une législature seulement passée à Berne. Cela
correspond à la logique arithmétique, mais surtout au fait que les idées
de Dominique Baettig ne correspondent pas à la culture politique de la
grande majorité des Jurassiens. Malgré ce recul, historique lui aussi,
des radicaux, l’UDC jouera encore un rôle sur les plans cantonal et
communal.
• Dans le Jura bernois, Jean-Pierre
Graber est arrivé premier des viennent-ensuite de la liste UDC. Il ne
retrouvera son siège au Conseil national que si Adrian Amstutz est réélu
au Conseil des Etats. C’est fort probable, mais le résultat de
Jean-Pierre Graber montre que le canton de Berne n’a aucun intérêt pour
sa minorité francophone. |